Voyage d’affaires

Sophie raccrocha, et Cathy reprit la conversation là où elle s’était interrompue. Les deux copines s’entendaient bien. Après des années passées à Amsterdam, elle commençait à pas mal parler l’anglais. Quelques mots de Hollandais, aussi, mais vraiment très peu.
Thierry était français, comme elles. Il était très doué, il parlait parfaitement toutes ces langues, et de temps en temps, il leur enseignait des expressions de base.

Les deux copines s’entendaient bien, et elles se marraient vraiment ensemble. Toutes deux avaient en commun le fait de ne pas appartenir à cette époque débile, et d’être bien au-dessus de la masse. Toutes deux étaient des artistes, de grandes artistes, mais elles n’avaient pas besoin de le prouver à ce monde. Et puis, rien n’était important en fin de compte.

Le téléphone de Cathy joua la sonnerie des inconnus. Comme les inconnus l’emmerdaient, elle leur avait assigné un strident bip-bip ! – ce qui, dans son esprit, était tout à fait logique.

« Hello ? » fit-elle.
Sophie vit un voile passer sur le visage de son amie. Celle-ci continua en français, se levant de table. Elle s’excusait de l’avoir contacté, et lui proposait d’en parler un autre jour, mais le type semblait insister. Sophie fit signe à Cathy de lui raccrocher au nez, mais non, elle continuait à s’excuser, et lui affirmait que tout était cool. Elle sortit dehors avec son téléphone pour continuer la discussion.
Le froid soudain lui fit l’effet d’une main osseuse, gigantesque

et glaciale, qui la saisissait comme une petite poupée toute maigre et toute nue, elle pouvait sentir le contact des grands doigts gelés sur ses côtes, et cela la refroidit jusqu’au sang.

13.

Arland écrasa sa cigarette en raccrochant le téléphone. Son nom n’était pas affiché sur le grand écran des voitures en attente, et il se dit qu’il en avait ras le bol, de cette compagnie de merde. Son nom aurait dû être là, avec le numéro de la place de parking. Clés sur le contact, rien d’autre à faire que démarrer, et faire rendre au moteur tout ce qu’il avait à donner – c’était bien là la raison d’être des bagnoles de location.

Il chercha dans ses cartes de fidélité celle qui portait le nom du loueur de voiture, puis la tenant bien haut, il s’appuya au comptoir, loin de la file d’attente, en fixant la blonde avec un regard qui signifiait très clairement « venez ici tout de suite ».
« Leila » disait le badge sur sa poitrine. Elle lui parla en Hollandais, Arland répondit en Anglais qu’il avait un voucher et le lui présenta.

« Oh, je vois, je vous prépare votre dossier tout de suite, Monsieur », fit-elle dans un Français parfait qui énerva Arland au plus haut point. « Vous venez de Roissy ? Il y a eu un accident sur les pistes, ce matin » s’enquit-elle, mais là, Arland était vraiment à bout. Une heure de son temps coûtait dans les trois cents dollars à sa société, et il n’était

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