Voyage d’affaires

autant qu’il l’aurait voulu.

En y réfléchissant, Roger Zeedijk était plus que content ce matin là. Parce qu’enfin, après toutes ces années passées dans ce même bureau à servir ses intérêts et ceux de sa société, il avait sous les yeux un dossier qui allait aider les autres, un peu, et changer la face du monde, un tout petit peu.
C’était un dossier commercial, qui servirait légèrement les intérêts commerciaux de la multinationale, aussi, mais dont les conséquences sur ce quartier pauvre de la banlieue d’Amsterdam seraient plus que profitables pour tous les malheureux qui l’habitaient.

Certes, ce projet n’apporterait presque rien à la société. Mais au moins, il n’en desservirait pas les intérêts. Bien sûr, ils n’avaient pas besoin de publicité. Et bien sûr, si quiconque apprenait le temps que Roger avait consacré à peaufiner ce dossier, le scandale éclaterait et l’on mettrait en doute l’utilité du quinquagénaire au sein de l’entreprise.

Mais tout était prêt. Le dossier était là, bouclé, et Roger était enfin content de lui. L’appréhension lui nouait un peu la gorge, parce que maintenant, après tout ce temps passé à en revoir les moindres détails, il lui fallait le soumettre à l’approbation de ses chefs. L’image du Roger de dix ans, souriant, fier du Roger de cinquante ans, ne lassait pas de satisfaire Roger ce jour là.

Seule l’appréhension lui gâchait un peu son bonheur, et c’était bien dommage.

« Tout se passera bien, se rassurait Roger. Ce coup ci, c’est pour une cause juste que je me bats. Et il y a un Dieu, pour les causes justes. »

4.

Patrick Arland arriva au bureau assez tôt. La journée précédente avait été un peu trop arrosée… le repas d’affaire de midi s’était transformé en dégustation de Cognac, pour prendre fin à cinq heures de l’après midi.
Arland se souvenait à peine du retour en taxi. Il s’était écroulé dans son canapé à six heures. À dix heures du soir, il s’était levé pour vomir. Après, c’est la fringale qui s’était emparée de lui. Tout ce qui n’était pas complètement périmé dans son réfrigérateur, il l’avait fini. Puis il s’était finalement réveillé, en pleine forme et tout habillé, à six heures du matin.
S’il lui étaient restées quelques cigarettes, il aurait volontiers fait la sieste, après avoir regardé le jour se lever sur Paris.

Patrick Arland n’avait pas grand chose à faire au bureau ce matin là, mais il y était. Il n’avait pas grand chose à faire au bureau en général, de toute façon. Il décida de consulter sa boîte aux lettes électroniques lui-même.

Il y avait parmi les courriers sans intérêt un message venant d’un sous-fifre du bureau de Hollande. Arland y jeta un coup d’œil rapide, juste parce qu’Amsterdam évoquait Rebecca à son souvenir, Rebecca, et la bouche de Rebecca.

Roger Zeedijk l’invitait dans son courrier à venir présider une

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